Quelles sont les deux grandes catégories d’infractions en matière de droit pénal de l’urbanisme ?
Les infractions à la législation de l’urbanisme peuvent prendre des formes très diverses.
La plupart des infractions relevant du droit pénal de l’urbanisme peuvent toutefois être classer en deux grandes catégories.
Il n’est pas rare qu’une personne soit poursuivie, en même temps, pour ces deux types infractions.
Les infractions aux règles de forme (ou de procédure)
Ces infractions sont réprimées par article L. 480-4 du Code de l’urbanisme :
« Le fait d'exécuter des travaux mentionnés aux articles L. 421-1 à L. 421-5 et L. 421-5-3 en méconnaissance des obligations imposées par les titres Ier à VII du présent livre et les règlements pris pour leur application ou en méconnaissance des prescriptions imposées par un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou par la décision prise sur une déclaration préalable est puni d'une amende comprise entre 1 200 euros et un montant qui ne peut excéder, soit, dans le cas de construction d'une surface de plancher, une somme égale à 6 000 euros par mètre carré de surface construite, démolie ou rendue inutilisable au sens de l'article L. 430-2, soit, dans les autres cas, un montant de 300 000 euros. En cas de récidive, outre la peine d'amende ainsi définie un emprisonnement de six mois pourra être prononcé (…) ».
Ce texte réprime, de manière générale, la réalisation de travaux en l’absence de l’autorisation requise.
Il s’agira ainsi, par exemple, de l’édification d’une construction sans obtention préalable d'un permis de construire, alors qu'il était requis.
Il pourra s’agir, également, de la réalisation de travaux en dépit de la péremption, du retrait ou de l’annulation du permis de construire qui avait été délivré en vue de la mise en œuvre d'un projet.
Les infractions aux règles de fond
Ces infractions sont réprimées par article L. 610-1 du Code de l’urbanisme :
« En cas d'infraction aux dispositions des plans locaux d'urbanisme, les articles L. 480-1 à L. 480-9 sont applicables, les obligations mentionnées à l'article L. 480-4 s'entendant également de celles résultant des plans locaux d'urbanisme.
Les sanctions édictées à l'article L. 480-4 s'appliquent également :
1° En cas d'exécution de travaux ou d'utilisation du sol en méconnaissance des obligations imposées par les articles L. 111-1 à L. 111-10, L. 111-15, L. 111-23, L. 115-3 et L. 131-1 à L. 131-7 ainsi que par les règlements pris pour leur application (…) ».
Ce texte réprime, de manière générale, la réalisation de travaux en méconnaissance des règles d’urbanisme qui s’appliquent sur le terrain, notamment prescrites par un Plan Local d’Urbanisme (PLU).
Il s’agira ainsi, par exemple, de l’édification d’une construction sur un terrain inconstructible ou en méconnaissance des règles d’implantation, de hauteur, etc.
Cette infraction peut concerner tant des travaux qui sont soumis à autorisation d’urbanisme que ceux qui, en raison de leur nature et/ou de leur faible importance, ne sont soumis à aucune autorisation.
Par qui et comment peuvent être constatées les infractions en matière de droit pénal de l’urbanisme ?
L’article L. 480-1 du Code de l'urbanisme vise les personnes qui peuvent procéder au constat des infractions à la législation de l’urbanisme. Il s’agit de tous les officiers ou agents de police judiciaire ainsi que tous les fonctionnaires et agents de l’Etat et des collectivités publiques.
Ces derniers doivent être spécifiquement commissionnés à cet effet par le maire ou le ministre chargé de l’urbanisme et être assermentés.
Les conditions de l’assermentation sont fixées aux articles R. 610-1 à R. 610-3 du Code de l’urbanisme.
Ce constat est généralement réalisé depuis la voie publique, notamment lorsque ce constat porte sur des construction ou travaux visibles de l’extérieur.
Toutefois, si la constatation ne peut se faire qu’en pénétrant sur une propriété, l’agent doit préalablement obtenir l’accord verbal ou écrit de l’occupant.
Ce procès-verbal sera transmis sans délai au ministère public, qui décidera des suites à donner, notamment s’il y a lieu d’engager des poursuites ou non.
Quelles sont les personnes qui peuvent être poursuivies en cas de travaux illégaux ?
La liste des personnes qui peuvent être pénalement responsables d'infractions en matière de droit pénal de l'urbanisme est fixée au 2ème alinéa de l’article L. 480-4 du code de l’urbanisme :
« Les peines prévues à l'alinéa précédent peuvent être prononcées contre les utilisateurs du sol, les bénéficiaires des travaux, les architectes, les entrepreneurs ou autres personnes responsables de l'exécution desdits travaux ».
Les personnes poursuivies en cas de travaux réalisés en méconnaissance de la législation de l’urbanisme peuvent donc être nombreuses.
Il peut ainsi s’agir, par exemple, des propriétaires des lieux en tant que « bénéficiaires des travaux », mais aussi des professionnels (architectes, entrepreneurs…) qui ont concouru à leur réalisation.
En vertu de l’article L 480-4-2 du Code de l’urbanisme les personnes morales peuvent être poursuivies pour des infractions à la législation de l’urbanisme, au même titre que les personnes physiques.
Elles peuvent être poursuivies pour les infractions commises pour leur compte, par leurs organes ou leurs représentants.
Quelles sont les sanctions pénales encourues ?
Qu’il s’agisse d’infractions aux règles de forme ou aux règles de fond, les sanctions sont les mêmes.
Elles sont fixées à l’article L. 480-4 du Code de l’urbanisme.
S’agissant des personnes physiques, en l’absence de récidive, la peine encourue est une amende dont le minimum est de 1 200 euros et donc le maximum est :
Dans le cas de construction d'une surface de plancher, une somme égale à 6 000 euros par mètre carré de surface construite, démolie ou rendue inutilisable ;
Dans les autres cas, 300 000 euros.
En cas de récidive, en plus d’une amende, une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à six mois pourra être prononcée.
S’agissant des personnes morales, en vertu de l’article L. 480-4-2 du code de l’urbanisme, les peines encourues sont les suivantes :
L'amende suivant les modalités prévues à l’article 131‑38 du Code pénal, à savoir, le quintuple de celui prévu pour les personnes physiques par la loi qui réprime l’infraction ;
les peines mentionnées aux 2o, 3o, 4o, 5o et 9o de l’article 131‑39 du Code pénal, à savoir respectivement :
l’interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, d’exercer directement ou indirectement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales ; cette interdiction porte sur l’activité dans l’exercice ou à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise ;
Le placement, pour une durée de cinq ans au plus, sous surveillance judiciaire ;
La fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus des établissements ou de l’un ou de plusieurs des établissements de l’entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;
L’exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus ;
L'affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication audiovisuelle.
Peut-on être condamné à démolir une construction illégale ?
L’article L. 480-5 du Code de l’urbanisme prévoit que, en cas de condamnation, le juge pénal peut aussi ordonner des « mesures de restitution », c’est-à-dire effacer les conséquences d’une infraction en ordonnance, par exemple, la démolition d’une construction illégale.
Le prononcé de telles mesures relève de l’appréciation souveraine du juge. Elles ne peuvent toutefois êtes ordonnées qu’au vue des observations écrites ou orales du maire ou du fonctionnaire compétent (Article L. 480-5 du Code de l’urbanisme).
Une telle mesure n’a pas le caractère d’une sanction pénale mais constitue une mesure à caractère réel. Elle est donc opposable, non pas seulement à la personne condamnée, mais aussi aux éventuelles futurs acquéreurs des constructions illégales.
Pour la bonne exécution de cette mesure, le juge pénal peut les assortir d’une astreinte, qui peut être de 500 euros au plus par jour de retard (Article L. 480-7 du Code de l’urbanisme)
Peut-on échapper à une condamnation pénale en cas de régularisation des travaux ?
En matière d’infractions au Code de l’urbanisme, la question se pose de savoir si la régularisation de la situation, notamment par l’obtention d’un permis de construire pour des travaux d’ores et déjà réalisés sans autorisation, est de nature à faire obstacle une condamnation pénale.
La jurisprudence est claire en la matière : dès lors que l’infraction est consommée, elle peut donner lieu à condamnation, et une régularisation postérieure ne permet pas de faire disparaître l’infraction.
Il sera donc possible d’être condamné pour cette infraction.
La régularisation ultérieure de la construction sera néanmoins généralement prise en compte par le juge pénal dans le cadre du prononcé de la sanction.
Par ailleurs, cette régularisation fera obstacle à une mesure de restitution et, notamment, l’obligation de démolir la construction édifiée irrégulièrement.
Quel est le délai de prescription des infractions au Code de l’urbanisme ?
Les infractions au Code de l’urbanisme sont des délits.
A ce titre, conformément à l’article 8 du Code de procédure pénale, le délai de prescription de ces infractions est de 6 ans.
En cas de construction illégale, le délai de prescription commence à courir à compter de l’achèvement des travaux.
Toutefois, ce délai de prescription peut être interrompu par l’établissement d’un procès-verbal, comme toute acte d’instruction ou de poursuite.